112
générale, les Etats ne peuvent pas dépendre dans l'exercice de leurs
droits de souveraineté d'autres Etats étrangers et s exposer ainsi a
toutes les éventualités qu'une telle situation peut engendrer. N'oublions
pas non plus que pendant fort longtemps le bolchévisme menagait
d'arriver au pouvoir a Vienne. De même le développement de
„l'Anschlussidee", avec son caractère politique, aurait fait dépendre
l'exercice de la souveraineté de l'Etat tchécoslovaque en ce qui
concerne les actes et documents déposés a Vienne, de la bonne
volonté de l'Allemagne. Enfin il était impossible de copier ou photo-
graphier les documents, ceux-ci étant par trop nombreux. La preuve
que ces extraditions n'ont aucunement interrompu Ia continuité des
archives viennoisses a été fournie par un article d'un expert autrichien,
le professeur L. Bittner, paru dans la revue „Archiv für Geschichte
und Politik" (année 1925)
La troisième question en face de laquelle les événements du 28
octobre 1918 plagaient le service des archives tchécoslovaques, est
celle de l'organisation de ce service en Tchécoslovaquie. En général,
on avait l'impression, encore aujourd'hui persistante, que le dualisme
dans l'organisation des archives qui a jusqu' a présent existé, archives
autonomes, dont l'esprit scientifique est trés développé, et archives
d'Etat, aux méthodes scientifiques surannées ne pourrait durer.
Ce sera d'autant moins possible que la constitution de la république
tchécoslovaque ne donne plus a l'administration autonome des compé-
tences assez étendues pour qu'eile puisse y garder de vieilles archives
régionales ou assumer le soin et la protection d'anciens documents
écrits, Dés le début, il était clair pour tout le monde qu'il fallait
joindre les archives régionales a celles de l'Etat, et faire ce que
l'administration autrichienne essayait maintes fois sans jamais reussir
c'est-a-dire créer une organisation satisfaisante des archives de l'Etat.
II ne pouvait y avoir de di^ergeances d'opinions que sur le moment
ou il conviendrait de commencer cette fusion. Des voix s'élevèrent
pour demander qu'on y procédat sans plus tarder, en fusionnant
archives de l'Etat et archives autonomes en une organisation nouvelle:
„les Archives nationales". Les Archives nationales tchèques, avec des
succursales a Brno (Brünn) et Bratislava (Pressburg) et dont l'organisa
tion s'inspirait au modèle des archives frangaises, devaient immédiate-
ment englober tout l'ensemble des archives de l'Etat, celles des
provinces comme celles du pays. On devait y joindre tous les fonds
d'archives revenant a la Tchécoslovaquie d'après le traité de paix ou
113
a la suite d une convention spéciale éventuelle sur eet objet. Devaient
encore être versés aux archives nationales tous les registres ou
archives des organes locaux de l'administration politique, judiciaire et
financière contenant les administrations centrales tchécoslovaques
postérieures au 28 octobre 1918, qui se décideraient de déposer
leurs plus anciens documents aux Archives nationales.
Le projet de creër „les Archives nationales" se montra irréalisable
sous cette forme, a laquelle pourtant il faut reconnaitre une grande
largeur de vues. Son installation exigerait d'abord beaucoup de temps
et en outre de grosses dépenses, deux choses que ne pouvaient
accorder les administrations centrales tchécoslovaques, qui avaient un
besoin immédiat de leurs archives particulières pour remplir leur tache
administrative, et cela dans le cadre même de leur propre organisation.
Cette nécessité conduisit certains départements ministériels (agriculture,
défense nationale, postes et télégraphes, chemins de fer, affaires
étrangères) a fonder des archives ministérielles.
Le point de vue du Ministère de l'Intérieur et son programme
l'emportèrent, lorsque baissa la vague d'enthousiasme que la révolution
avait soulevée, enthousiasme qui avait disposé Ie pays a réaliser les
plus vastes projets. Ce programme fut également adopté par le
Ministère compétent en matière d'archives, e'est a dire par le Mini-
tère de l'Instruction Publique. Ce Département fonda en 1920 une
Ecole d'archivistes, sur le modèle de l'Ecole des Chartes
a Paris et de l'lnstitut viennois des recherches sur l'his-
toire delAutriche. En 1924, ce même Ministère présenta a la
Chambre un projet de loi sur la réorganisation des archives d'Etat.
Outre les archives des administrations et des tribunaux, mentionnées
ci-dessus, furent créées en vertu de cette loi des Archives centrales
historiques avec siège principal a Prague et succursales a Brno (Brünn),
Bratislava (Pressburg) et Kosice (Kaschau). La loi supprime done le
dualisme qui régnait jusqu' a présent dans les archives qui dépendent
de l'administration nationale comme dans celles qui sont du ressort
des administrations provinciates. De plus elie tranche par Ie fait même
toutes les discussions pouvant s'élever a ce sujet entre Ministères,
puisque c'est Ia Présidence du Conseil qui, désormais, sera reconnue
compétente en matière d'archives. La loi en question fut précisément
l'objet de discussions constitutionelles.
Le Ministère de l'Intérieur, revendiquant, comme succes seur de
l'ancien Conseil impérial et royal susnommé, la competence dans ce
domaine des archives, prit sous son administration, en 1919, les an
ciennes archives impériales et royales du gouvernement de Prague, a
titre d'archives du Ministère de l'Intérieur. Mais il déclara, presque en
même temps que ces archives constitueraient des archives historiques
Aux observations de M. OPOCENSKY ie n'opposerai qu'une remarque bien
simple: savoir que le patriotisme, quelque honorable qu'il soit, et la méfiance des
autres nations sont de mauvais conseillers tant en matière d'archivistique qu'en général
pour la solution des problèmes scientifiques (R. F.).